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28 novembre 2022

PROPAGANDE Tome 1

 

La mode est à la vérification des faits («fact-checking» en bon franglais), dont un esprit chagrin aurait pu penser qu’elle tombait sous le sens et qu’elle constitue une, sinon LA règle majeure de la déontologie journalistique.

Il s’agit de la part d’un authentique journaliste, mais par delà de quiconque prétend à former ou informer (politique, philosophe, enseignant, chercheur, etc.), de repérer, de mettre en évidence et de dénoncer:

  • les imprécisions, inexactitudes et omissions (involontaires)

  • les déformations de l'information (volontaires ou non)

  • les informations vraies, mais présentées hors de leur contexte (volontaires ou non)

  • les reprises d'informations fausses (volontaires ou non; on parle alors de désinformation)

  • le mensonge (acte volontaire)

Etant donné l’indigence générale de l’argumentation dans le débat sur l’abolition de la corrida (mais il en va de même pour la chasse à courre, le gavage, etc.), l’accumulation de désinformations, de mensonges, d’approximations, de contre-vérités, et ce de part et d’autres, on entrevoit la distance intergalactique encore à parcourir pour parvenir à un traitement décent de l’information.

Avant de poursuivre, il convient de lire ou de relire, l’un des textes fondamentaux de la modernité occidentale, de l’esprit critique et scientifique:

La dent d’or

«Assurons-nous bien du fait, avant de nous inquiéter de la cause.  Il est vrai quecette méthode est bien lente pour la plupart des gens, qui courent naturellement à la cause, et passent par-dessus la vérité du fait; mais enfin nous éviterons le ridicule d’avoir trouvé la cause de ce qui n’est point.

Ce malheur arriva si plaisamment sur la fin du siècle passé à quelques savants d’Allemagne, que je ne puis m’empêcher d’en parler ici. »


«En 1593, le bruit courut que les dents étant tombées à un enfant de Silésie, âgé de sept ans, il lui en était venu une d’or, à la place d’une de ses grosses dents. Horstius, professeur en médecine dans l’université de Helmstad, écrivit en 1595 l’histoire de cette dent, et prétendit qu’elle était en partie naturelle, en partie miraculeuse, et qu’elle avait été envoyée de Dieu à cet enfant pour consoler les chrétiens affligés par les Turcs. Figurez-vous quelle consolation, et quel rapport de cette dent aux chrétiens ni aux Turcs. En la même année, afin que cette dent d’or ne manquât pas d’historiens, Rullandus en écrit encore l’histoire. Deux ans après, Ingolstetetus, autre savant, écrit contre le sentiment que Rullandus avait de la dent d’or, et Rullandus fait aussitôt une belle et docte réplique. Un autre grand homme nommé Libavius ramasse tout ce qui avait été dit de la dent, et y ajoute son sentiment particulier. Il ne manquait autre chose à tant de beaux ouvrages, sinon qu’il fût vrai que la dent était d’or. Quand un orfèvre l’eut examinée, il se trouva que c’était une feuille d’or appliquée avec beaucoup d’adresse ; mais on commença par faire des livres, et puis on consulta l’orfèvre.»

«Rien n’est plus normal que d’en faire autant sur toutes sortes de matières. Je ne suis pas si convaincu de notre ignorance par les choses qui sont, et dont la raison nous est inconnue, que par celles qui ne sont point, et dont nous trouvons la raison. Cela veut dire que non seulement nous n’avons pas les principes qui mènent au vrai, mais que nous en avons d’autres qui s’accommodent très bien avec le faux.»

— Fontenelle, «Histoire des oracles, IV».


Publié en 1687, cet apologue1 demeure d’une actualité criante. Ces derniers temps le débat a démontré à l’envi la méconnaissance profonde de la plupart des intervenants sur le sujet de la corrida. Politiques, chroniqueurs, philosophes, journalistes, présentateurs, artistes, bateleurs se sont succédés pour asséner des opinions irréfragables en exprimant leur méconnaissance de ce dont ils prétendaient disserter. Le summum étant atteint chez le démolisseur en chef, Aymeric CARON, qui reconnait n’avoir jamais assisté à une corrida.

Notre Torquemada en herbe, en dépit de ses prétentions, n’est certes pas un phénix de la pensée et atteste que le fanatisme et la bétise sévissent activement. Mais lorsque deux éminents représentants de l’arrogance parisianiste commencent à débiter moult couillonnades (la corrida serait héritière des combats de gladiateurs!!!) en se gaussant comme des pintades niaises de leurs collègues divergents et de ces ploucs demeurés que nous sommes à leurs yeux on peut prendre la pleine mesure de l’emprise animaliste à l’oeuvre.

Voir: EN TOUTE FRANCHISE (lire entre les plages 1h29 à 1h36).

Sur LCI, chaîne d’information2? «Télé-Bouygues»? «Télé-LREM»? cornaquée par Gilles Pélisson, ex PDG d’EuroDysney, l’impartialité et l’éthique journalistiques ne sont pas une priorité. Comme sa rivale Cnews, on donne de plus en plus dans la querelle de comptoir façon Café du Commerce au détriment de la rigueur.

Pour se refuser aux attaques ad personam3 on ne peut renoncer aux arguments ad hominem4, surtout lorsque votre contradicteur ne vous manifeste aucun respect.

Luc Ferry (71 piges), philosophe subventionné de salon, «obligé du pouvoir» selon son confrère Jacques Bouveresse, apôtre d’une laïcité intransigeante certes, mais Ministre de l’Education Nationale ayant 2 filles dans l’enseignement confessionnel, n’est pas à une incohérence près. Ce Père Emptoire n’en finit pas d’asséner ses vérités révélées avec un mépris affiché pour ses contradicteurs. Croyant savoir, il se dispense de penser librement. Piètre philosophe sans questions!

Quant à Jean-François Kahn (83 printemps), sympathique et éternel trublion journalistique, auteur de «La pensée unique», se souvient-il encore avoir écrit un brûlot sur les médias, victimes selon lui de cette même pensée unique: «L’horreur médiatique»?

Peut-être manquait-il un troisième pépé, mon copain Al Zheimer, pour entonner avec le croustillant et rafraichissant GOTAINER, 3 vieux Papys.

Il faut toutefois entendre leurs divagations. Elles sont partagées. Elles doivent être contredites.

A SUIVRE

1- Court récit imaginaire ou parfois réel, à visée argumentative, dont se dégage une vérité morale.

3- Argumentum ad personam: attaque personnelle.

4- Argumentum ad hominem: attaquer son adversaire sur la cohérence de ses propos en lui opposant ses propres paroles ou ses propres actions


17 novembre 2022

Des maux et des mots: barbarie, barbares et barbaresques…

 


«Chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de son usage.»

«Les Essais I, 31: Des cannibales» Michel de Montaigne


Durant l’Antiquité, les barbares étaient pour les Grecs ou les Romains, tous ceux qui ne parlaient pas, ne pensaient pas, ne vivaient pas comme eux.

La racine du mot barbare (latin barbarus, «étranger par rapport aux Grecs ou aux Romains»), emprunté au grec ancien βάρβαροςbárbaros) provient du borborygme «bar-bar» par lequel les gens prétendument civilisés que se prétendaient grecs et romains se moquaient du langage des autres.

Le «barbare» qualifie ceux qui sont réputés sauvagesgrossiersignorants; ceux qui manquent de civilisation, des humains non éduqués, trop rustres pour apprécier les beautés de la nature et de l’art. Le portrait exact que d’aucuns peignent des aficionados, chasseurs, pécheurs, éleveurs, bouchers, etc.

Au nom de la civilisation, les aimables philanthropes qu’étaient ces grecs et romains antiques ont conquis, ravagé et anéanti une multitude de peuples et cultures. Alexandre le Grand, qui se voulait le héraut et le héros de l’hellénisme (alors que pour les grecs il n’était qu’un macédonien et donc un barbare...) a commis les pires atrocités lors de ses conquêtes, détruisant sans états d’âme les civilisations égyptienne, phénicienne, achéménide (les anciens perses) et brûlant Persépolis, etc., etc., etc.

Idem pour les romains qui s’employèrent vaillamment à soumettre, détruire et réduire à l’esclavage tous les peuples méditerranéens et plus au Nord, depuis la Numidie et la Cyrénaïque jusqu’à la Germanie et la Grande Bretagne en passant par les Gaules. Ethnocides répétés et systématiques.

Plus proches de nous, de la Renaissance au XIXème siècle, ce sont les barbaresques (qui a donné également Berbérie, le pays des Berbères) que l’on honnissait joyeusement, ces affreux qui pillaient nos contrées, capturaient des esclaves, se montraient inhumains et cruels en toutes choses.



L’Occident très civilisé sut y mettre le holà.

Il s’y mirent à plusieurs et en plusieurs épisodes. Sait-on que de 1801 à 1805, puis en 1815, les Etats-Unis d’Amérique menèrent deux guerres contre les Barbaresques avant que sous des prétextes futiles (une sombre histoire de coup d’éventail -ou de chasse-mouches- porté en 1827 par le Dey d’Alger au Consul de France: la France n’avait pas honoré ses créances) les troupes françaises n’envahissent l’Algérie.

Cette conquête fût tout sauf pacifique et donna lieu aux pires atrocités à l’encontre des barbares(ques). Du Général Boyer, surnommé «Pierre le Cruel» en passant par le Général Savary (un immonde salopard, chargé des basses œuvres de Napoléon Ier), le général Bugeaud (qui portait la casquette parce qu’il avait fait raser Sétif…), le Général Sillègue, jusqu’au summum qu’incarna le Général Lamoricière (des écoles portent le nom de ce grand criminel de guerre), la conquête de l’Algérie fut un long cortège d’infamies commises au nom de la «mission civilisatrice» du peuple français.

De retour d'un voyage d'enquête en Algérie, Alexis de Tocqueville qui n’était pas précisément un dangereux gauchiste écrivit «nous faisons la guerre de façon beaucoup plus barbare que les Arabes eux-mêmes […] c'est quant à présent de leur côté que se situe la civilisation.».

Rappelons que la côte des Barbaresques recouvre le Maghreb actuel.

De quoi, de quoi ! Les maghrébins seraient-ils des barbares? Voilà qui ferait tache dans le curriculum de Monsieur Caron.


On voit donc que tout un chacun peut être le barbare de l’autre, que le barbare n’est souvent pas celui qu’on pense et enfin que l’inconséquence n’effrayant nullement les esprits les plus vertueux, on passe aisément de la civilisation à la barbarie.

En voulez-vous un exemple ?

Qui a proclamé «Un vainqueur qui fait mourir ses ennemis captifs est appelé barbare!», qui a pondu en 1791 au sein de l’Assemblée Constituante un célèbre «Discours sur la peine de mort» (Sur l'abolition de la peine de mort?

Allons, un gros effort, la réponse n’est certes pas évidente !

C’est Mad Max! Vous savez l’homme de la «Grande Terreur», le promoteur du tronçonnage de cous en série, le génocidaire de la Vendée, le commanditaire des noyades de Nantes ou des Représentants en mission qui faisaient du tourisme régional suivis de leur guillotine. Oui ! Robespierre en personne...

A méditer par nos édifiants moralisateurs d’aujourd’hui.

«T'en fais, pas mon p’tit loup »

Dernier chapitre sur la problématique générale du «p’tit loup». A partir d’éléments factuels et chiffrés, on constate l’ineptie d’un Plan lo...