17 novembre 2022

Des maux et des mots: barbarie, barbares et barbaresques…

 


«Chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de son usage.»

«Les Essais I, 31: Des cannibales» Michel de Montaigne


Durant l’Antiquité, les barbares étaient pour les Grecs ou les Romains, tous ceux qui ne parlaient pas, ne pensaient pas, ne vivaient pas comme eux.

La racine du mot barbare (latin barbarus, «étranger par rapport aux Grecs ou aux Romains»), emprunté au grec ancien βάρβαροςbárbaros) provient du borborygme «bar-bar» par lequel les gens prétendument civilisés que se prétendaient grecs et romains se moquaient du langage des autres.

Le «barbare» qualifie ceux qui sont réputés sauvagesgrossiersignorants; ceux qui manquent de civilisation, des humains non éduqués, trop rustres pour apprécier les beautés de la nature et de l’art. Le portrait exact que d’aucuns peignent des aficionados, chasseurs, pécheurs, éleveurs, bouchers, etc.

Au nom de la civilisation, les aimables philanthropes qu’étaient ces grecs et romains antiques ont conquis, ravagé et anéanti une multitude de peuples et cultures. Alexandre le Grand, qui se voulait le héraut et le héros de l’hellénisme (alors que pour les grecs il n’était qu’un macédonien et donc un barbare...) a commis les pires atrocités lors de ses conquêtes, détruisant sans états d’âme les civilisations égyptienne, phénicienne, achéménide (les anciens perses) et brûlant Persépolis, etc., etc., etc.

Idem pour les romains qui s’employèrent vaillamment à soumettre, détruire et réduire à l’esclavage tous les peuples méditerranéens et plus au Nord, depuis la Numidie et la Cyrénaïque jusqu’à la Germanie et la Grande Bretagne en passant par les Gaules. Ethnocides répétés et systématiques.

Plus proches de nous, de la Renaissance au XIXème siècle, ce sont les barbaresques (qui a donné également Berbérie, le pays des Berbères) que l’on honnissait joyeusement, ces affreux qui pillaient nos contrées, capturaient des esclaves, se montraient inhumains et cruels en toutes choses.



L’Occident très civilisé sut y mettre le holà.

Il s’y mirent à plusieurs et en plusieurs épisodes. Sait-on que de 1801 à 1805, puis en 1815, les Etats-Unis d’Amérique menèrent deux guerres contre les Barbaresques avant que sous des prétextes futiles (une sombre histoire de coup d’éventail -ou de chasse-mouches- porté en 1827 par le Dey d’Alger au Consul de France: la France n’avait pas honoré ses créances) les troupes françaises n’envahissent l’Algérie.

Cette conquête fût tout sauf pacifique et donna lieu aux pires atrocités à l’encontre des barbares(ques). Du Général Boyer, surnommé «Pierre le Cruel» en passant par le Général Savary (un immonde salopard, chargé des basses œuvres de Napoléon Ier), le général Bugeaud (qui portait la casquette parce qu’il avait fait raser Sétif…), le Général Sillègue, jusqu’au summum qu’incarna le Général Lamoricière (des écoles portent le nom de ce grand criminel de guerre), la conquête de l’Algérie fut un long cortège d’infamies commises au nom de la «mission civilisatrice» du peuple français.

De retour d'un voyage d'enquête en Algérie, Alexis de Tocqueville qui n’était pas précisément un dangereux gauchiste écrivit «nous faisons la guerre de façon beaucoup plus barbare que les Arabes eux-mêmes […] c'est quant à présent de leur côté que se situe la civilisation.».

Rappelons que la côte des Barbaresques recouvre le Maghreb actuel.

De quoi, de quoi ! Les maghrébins seraient-ils des barbares? Voilà qui ferait tache dans le curriculum de Monsieur Caron.


On voit donc que tout un chacun peut être le barbare de l’autre, que le barbare n’est souvent pas celui qu’on pense et enfin que l’inconséquence n’effrayant nullement les esprits les plus vertueux, on passe aisément de la civilisation à la barbarie.

En voulez-vous un exemple ?

Qui a proclamé «Un vainqueur qui fait mourir ses ennemis captifs est appelé barbare!», qui a pondu en 1791 au sein de l’Assemblée Constituante un célèbre «Discours sur la peine de mort» (Sur l'abolition de la peine de mort?

Allons, un gros effort, la réponse n’est certes pas évidente !

C’est Mad Max! Vous savez l’homme de la «Grande Terreur», le promoteur du tronçonnage de cous en série, le génocidaire de la Vendée, le commanditaire des noyades de Nantes ou des Représentants en mission qui faisaient du tourisme régional suivis de leur guillotine. Oui ! Robespierre en personne...

A méditer par nos édifiants moralisateurs d’aujourd’hui.

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